Je venais d'avoir 18 ans.

 Et vous ? vous rappelez-vous vos 18 ans ?

"Où étiez-vous ? avec qui les avez-vous fêtés ?

Quels étaient vos rêves, vos projets, vos envies ? Les avez-vous réalisés ?"

 C'est en ces termes qu'Ambre nos lance ce petit défi. Celui de nous remémorer si longtemps aprés un épisode de notre jeunesse, parfois si bien enfoui qu'il s'en est enfuit. 

Les miens, si mes calculs sont bons, remontent à l'année 1970.

Que se passait il cette année là ? Quels souvenirs en ai je gardé ? Quels étaient mes rêves ? Mes projets ? Mes envies ? 

 Sans doutes je rêvais du prince charmant, un grand brun aux yeux marrons, ayant fière allure, un regard doux, des bras musclés, en bon sportif qu'il était. 

Sans doute je l'imaginais plein de douceur et de délicatesse, protecteur, rassurant et plein d'entrain. Surement qu'il l'était d'ailleurs et mes envies , mon envie étaient de le rencontrer. Pour cela j'avais imaginais des stratagèmes à plusieurs dimensions, mais il me fallait mettre dans mes projets de partir loin de la maison et de travailler. Cela attendrait  bien, puisque je n'avais pas encore terminé mes études mais dès  que je trouverais du travail, pas loin d'où je risquais de le trouver, c'est à dire dans la plus grande des villes que je connaisse, je partirai, de plus à la maison, la place   était réduite. 

Nous étions 9 bouches à nous nourrir sur une toute petite exploitation familiale de 5 ha avec deux ou trois de plus que mon père travaillait à la moitié, ce qui nous permettait un petit troupeau d'une huitaine de têtes, à cornes les têtes, quelques volailles, deux ou trois cochons dont un garnirait d'ici la fin de l'année, le saloir et le pot de gré  et quelques lapins. Ma mère faisait un petit jardin, où deux groseillers donnaient de quoi faire quelques pots de confitures pour accompagner les fromages, tiraient du lait de nos vaches. Bon an mal an, nous cultivions un peu de céréales, des choux, des raves et des pommes de terre. 

Mes petites soeurs allaient à l'école, les dernières, dont la plus petite entrerait en primaire à l'automne avaient encore du temps, celui de l'enfance et leurs soucis étaient surement d'écouter Mike Brant, Jhonny, ou Patrick Juvet, en chantant à tue tête ou en faisant  des niches* aux voisins, particulièrement à ce trop de Roger, ou à sa mère la Francine. 

Les niches ce sont des farces plus ou moins drôles dans le patois de notre région et contrairement à nous les deux grandes, qui avions de quoi nous occuper, ne serait ce que pour les surveiller ; les filles  aimaient bien se distinguer par des facéties plus ou moins douteuses... 

Mon père sa journée terminée, se rendait parfois à une réunion. Elu municipal, il se rendait souvent en mairie, mais se plaignait beaucoup de ne pas être entendu par l'équipe dirigée par un maire  de peu d'ambition. Il était aussi délégué cantonal pour la mutualité agricole. 

Quand il revenait de ces réunions, parfois fort tard, nous avions déjà ma mère et nous, terminé la traite du soir. Je me souviens que ma mère s'inquiétait beaucoup. Tant de l'état dans lequel il arriverait, que de l'heure à laquelle il reviendrait. "Pourvu qu'il ne lui soit rien arrivé"  était son  leitmotiv.

 Lorsqu'il franchissait le seuil de la maison, nous savions tout de suite à quoi nous devions nous attendre. Était il de bonne humeur, et nous aurions droit à quelques confidences émaillées de traits d'humour ( dont la subtilité nous échappait parfois). Était il d'humeur maussade, nous n'avions pas intérêt à la ramener, ni à faire du bruit, parce que cela tombait et pas toujours à côté " Yu vé prindre lo brancho" disait il en patois et nous savions alors parfaitement à quoi nous en tenir.

Pendant les vacances, j'allais garder, ou bien j'allais aux champs suivant l'ordre des saisons, suivant la nature des travaux. Le monde qui m'entourait était plein d'espoirs qui s'éloignaient à chaque pas en avant que je faisais. L'aprés 68  ne se révélait pas si engageant qu'il avait été permis de le penser...  (à suivre)







4 commentaires:

  1. Émouvante cette photo de famille, tu es où ?
    Faire des niches à quelqu'un, il me semble que je connais cette expression aussi. :)
    Quant au prince charmant, tu me fais penser à ce que j'avais dit à mes parents, un jour, à savoir que je ne voulais pas d'un blond aux yeux bleus (nous le sommes tous dans la famille). Après avoir testé quelques "étrangers", le père de mes enfants a les yeux bleus, et les cheveux plutôt clairs, et j'ai eu deux fils blonds aux yeux bleus. :)
    Depuis ce matin il neigeote, et là la neige semble vouloir blanchir le paysage !
    Je t'embrasse ma courageuse Délia

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  2. Merci Fabie, tu vois la nature ne nous épargne pas toujours ! elle nous fait aussi des niches de temps en temps, ainsi mon grand brun s'est transformé en moyen blond à moitié et chauve pour l'autre moitié aux yeux bleu et plutôt trapu.
    Sur la photo ? La dame brune avec un collier et la grande blonde sur la gauche sont des personnes en vacances, venu pour nous saluer. Sur la droite avec un rateau, c'est mon papa, la petite que la dame brune tient par la main, c'est la petite Nathalie, et moi je suis en planque derrière mon petit frère, on ne voit que mon noeud dans les cheveux. Pour le moment ici il neigeotte et fait un froid de canard. Je ne suis pas sortie aujourd'hui. La voisine est venue boire le café pour l'occasion j'ai interrompu mon régime et fait un cake. Bises ma Fabie, bon courage à toi, il me semble que tu n'est pas en reste non plus !

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  3. Je serais curieux de savoir combien de gamins, maintenant, ont vu la naissance d'un veau ?
    Lui souffler dans la bouche, pour lui décoller les poumons, l'approcher de sa mère pour qu'en le léchant, elle reprenne des forces ?
    Mes origines paysannes sont toujours là.

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  4. Je pense que la vraie richesse, c'est celle là. Le reste, c'est à dire celle qu'on nous refuse, c'est juste pour nous permettre de vivre de notre travail, qu'on en aurait besoin.

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Destination Auvergne.