Quand j'ai débuté ma carrière, non pas au french cancan, mais comme opératrice téléphonique, comme toute provinciale, avide de connaissance et de découverte, je rêvais de venir à Paris. Je demandais donc une mutation pour la capitale. Je passais un concours et fus nommée a Paris. Trés vite je demandais à venir sur la butte et intégrais le central le central Montmartre. Mais cela ne se fit pas tout de suite. En attendant j'en profitais pour découvrir en touriste presque parfaite, les coins célèbres et les plus pittoresques que sont : la place du Tertre, le Sacré Coeur et sa basilique, quelques rues abritant des cabarets de renommée mondiale, comme "La grange au bouc" ou "Le Lapin Agile et le "Chat Noir", le quartier Pigalle, le moulin rouge et celui de la galette. Je me souviens que ces lieux m'impressionnaient. En petite provinciale naïve et peu avertie, j'avais souvent entendu parler de Mistinguette, de Patachou ou de madame Arthur. Je ne voyais pas franchement et ne comprenais pas non plus pourquoi en parlant de ce quartier, les hommes gloussaient et les femmes se détournaient de la conversation, comme si une chose honteuse en émanait. On m'avait aussi, bien recommandé de ne pas "trainer par là bas", comme si je risquais quelque chose de grave. C'est donc avec quelque appréhension que j'en découvrais les contours. Puis contact pris, je m’aperçus bien vite que je risquais bien plus ailleurs qu'ici, je choisis donc d'y revenir aussi souvent que j'en avais envie.
Parfois, remontant le boulevard depuis la place Blanche, vers Anvers et Barbès j' inspectais tous les endroits qu'un connaisseur avisé se doit de connaitre s'il ne veut pas passé pour un vulgaire amateur. Je faisais un saut chez Tati avant de contourner l'immense édifice par la rue de Clignancourt et revenir par le marché Saint Pierre où je faisais provision de tissus et mercerie diverse avant de remonter la butte versant Est. Naturellement je ne connaissais de Montmartre, que ce que tout le monde connait. C'est à dire rien.
Rien, car le vrai Montmartre, j'allais le découvrir plus tard. 4 ans plus tard. Et là je découvrais pour de bon la place Blanche et son coeur palpitant. Calme le jour, foisonnant la nuit. Mais qui n'a pas fait un tour de Paris by nigth ne comprend pas bien ce que cela signifie.
Je me souviens aussi avoir conduit mon fils dans ce quartier où il y avait une clinique non loin pour y subir une intervention chirurgicale. Il était alors tout bébé. Je revois les murs jaunes de la clinique, les draps blancs et sa petite chemise bleue. Il me souriait. On aurait dit un ange sur un nuage. Quand on vint le chercher pour l'opérer, il fut pris de panique et moi aussi. Je ne le montrais pas mais j'eus le coeur gros. L'intervention ne dura que quelques instants. Il resta une nuit en observation, moi à ses côtés. Le lendemain on rentrait à la maison.
J'ai souvent traversé la place Blanche par la suite en diverses occasions, ne serait ce que pour me rendre vers Saint Lazare où là aussi je laissais mes pas me porter vers les grands boulevards où il y a tant de choses, tant de choses à voir.