Hier.

Hier, c'était dimanche. Pas de marché. J'ai décidé de le boycotter puisque en cette saison on ne s'y fait qu'arnaquer ! Pas de balade avant 17 h, heure à laquelle on peut espérer que la chaleur tombe un peu.
Et bien, me direz vous, alors, qu'as tu donc fait ? Je vous répondrais rien. Rien de particulier. Une petite escapade   chez belle maman.
Je ne suis pas rentrée  trop tard pour retrouver la Ponette qui finissait sa journée. C'est à ce moment que nous sommes parties un peu marcher. La chaleur nous plombait. Nous n'avons pas fait un grand tour, pas de photo non plus.
Au retour nous avons pris un peu de repos, puis l'heure avançant,la faim nous tenaillait. C'est alors que nous nous sommes extirpées de notre torpeur et avons esquissé une salade. Au cours du repas, je lui confiais ne pas avoir vu Jaunet depuis deux ou trois jours. Nous le pensions perdu dans quelques buissons alentours, mal en point, incapable de revenir.  Nous n'avions aucune illusion à son sujet. La tribu des autres chats se prélassait mollement, l'un somnolait sur un fauteuil, l'autre réclamait sa pitance, bref tout semblait ronronner normalement. C'est à la tombée du soir que la Ponette a aperçu un masse informe, tapi dans un coin du jardin, à l'ombre d'un feuillage.
C'est bouleversée qu'elle est venue m'annoncer la mort de Jaunet.
Il n'était pas mort depuis longtemps, en tout début d'après midi, tout au plus. Son corps n'était pas encore rigide totalement. Après l'avoir délicatement transporté jusqu'à un coin d'ombre, nous lui  avons creusé une tombe et posé au pied de l' althéa, dans le carré des chats.
Jaunet avait tout juste onze ans. Quand sa mère est venue se retirer avec toute sa portée, dans la cabane du jardin, nous étions en vacances, c'était en juillet. A notre retour nous les avons découverts puis apprivoisés petit à petit. Mais lui ne venait pas à la maison. Il était sauvage. Du temps de sa jeunesse, il courait la campagne, restant parfois plusieurs semaines sans apparaitre. Quand il rentrait, sale et pouilleux, il avait faim. C'est alors qu'il venait quémander sur le bord de la fenêtre. Nous lui donnions à manger. Nous le peignions un peu. L'hiver parfois il s'installait dans la cuisine et se laissait approcher. Puis il demandait bien vite à retrouver sa liberté. Nous luis ouvrions la porte et il repartait. Méfiant, il refusait toute approche quand il était dehors. Le voisin, un sale con, le chassait à coup de cailloux, comme il chassait les autres. Mais les autres moins craintifs venaient se réfugier vers nous. Sans doute Jaunet en aurait fait de même, mais à chaque fois, un nouvel assaut du matamore le faisait fuir. Il était toujours en alerte, sur le qui vive. Quand il entendait notre voix, si le secteur était calme,  il revenait.  Les seuls moments de répit étaient ceux qu'il passait autour de nous.
Il se montrait maternant avec les plus petits. Il se battait beaucoup avec les autres matous, son frère en particulier. Tout un hiver, il est resté au chaud,
peut être qu'à ce moment nous aurions du tenter de   faire le nécessaire pour qu'il reste à la maison. Mais au printemps,  à l'appel des chattes des forêts, il repartit. Je ne sais pas ce qui s'est passé à ce moment, là, mais quand il est revenu, il était définitivement sauvage et inapprochable. Ces derniers temps, malade, il demandait à rentrer plus souvent. Il mangeait avec les autres puis il repartait. Nous savions bien comment il finirait.
C'était un vagabond, mort comme il a vécu, libre et sans déranger. Comme meurent bien des hommes, seuls et sans abri. Démunis de toute compagnie.
Quand nous l' avons enseveli, Flocon était avec nous et Plume n'était pas loin. Puis Plume  nous a suivi et ne nous a plus quitté de la soirée, chose qu'elle ne fait jamais. Son regard était tendre et inquiet. Comme si elle nous disait :" vous n'allez pas me laisser partir, moi aussi, hein ? Vous allez bien vous occuper de nous, car je ne veux pas finir comme lui. " . C'était comme si elle nous demandait en prière, de toujours veiller sur elle. Cette petite minette a vraiment un comportement particulier et s'exprime mieux que si elle parlait.
Quant à  nous, nous avons toujours une relation particulière avec chacun. Jaunet nous aimait  et nous faisait confiance. Nous l'aimions aussi et respections son choix de vie. A aucun moment nous avons tenter de le forcer  à vivre autrement. Nous aurions pu le capturer, le faire castrer, mais nous avions choisi de le laisser en paix, vivre sa vie, comme il voulait. Nous savions qu'il n'accepterait jamais  ni d'être capturé, ni d'être sociabilisé, il se défilait et se débattait dès qu'il sentait une main trop ferme et entreprenante. C'était un être libre. Alors nous le laissions libre, sans contrainte. Nous l'avons soigné, comme nous l'avons pu, nous avons tenté de le réconforter. Nous avons tenté de l'apprivoiser, comme il refusait, nous avons fait notre possible pour garder sa confiance. Et il nous l'a donnée.
 Ce matin, Plume est apaisée. Moi je regarde par la fenêtre, si je ne le vois pas apparaitre au bout de l'allée.

7 commentaires:

  1. Il me fait penser à ces chats, que je nourrissais en Israël, j'en ai ramené Balagan, morte trop tôt comme ton chat, ces chats qui ont été chassés par des c.o.n.s. Je t'embrasse

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. T'es mignone, merci ! Balagan, qui ressemblait à Lolotte, tu m'as dit. Elle devait être magnifique. Mais comme tu le dis, quand dans leur périmètre se trouvent des cons et qu'un seul suffit, on a beau faire tout ce qu'on peut, c'est quand même dingue que ce soit eux les plus forts ! Peut être parce que la bêtise ne se raisonne pas et qu'ils sont les plus nombreux ?

      Supprimer
  2. Mes yeux ne m'ont pas permis de lire ton texte pour moi pas assez contrasté... J'étais venue lire ton devoir du lundi et tu as écrit sur tes chats...
    J'ai moi aussi longtemps habité chez mes chats. Je n'en ai plus et je peux voyager sans fil à la patte

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Gwen, pour t'être agréable, j'ai changé la couleur de la police, j'espère que tu pourras mieux lire. Tu comprendras ainsi que l'actualité ne me prédisposait pas à faire un tour en mer (je ne sais pas nager, je préfère les randonnées en montagne et n'avais pas le coeur au pastis). Les chats sont sans doute un fil à la patte, mais il y a tellement de satisfactions avec eux, je vois que tu es comme Jaunet, libre !

      Supprimer
  3. Comme c'est triste ce que tu racontes. Mais j'aime ta relation aux chats et que tu respectes leur liberté.
    Sais-tu ce qu'il avait comme maladie ? J'espère que ce n'est pas ce con de voisin qui l'a fait mourir...
    Je t'embrasse.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Praline. J'aime bien ton regard sur les autres, hommes ou bêtes, aussi.
      Je pense qu'il avait surement la leucose féline ou quelque chose du genre, comme il était impossible de le capturer pour lui imposer la cage, mais le comportement du voisin est responsable du fait que nous ne pouvions pas l'approcher pour le soigner comme il aurait fallu. Dommage pour le devoir sur le pastis et le rendez vous du lundi, de plus je ne savais pas vraiment comment traiter le sujet, et hier après c'était trop tard pour y réfléchir. Je t'envoie plein de bises sucrées salées.

      Supprimer
  4. Tes histoires de chats me bouleversent. Paix éternelle pour Jaunet. Chez mon frère, vers St Hilaire la Croix, nous nous sommes remémorés tous les animaux qui dorment dans le pré... ET à la ville, il y avait la chatte de ma soeur que j'ai bien câlinée car je suis en manque :) mais raisonnable !

    RépondreSupprimer

7 extraits.