Une vie de chien

Violette est un bon chien. Chien fidèle. Calme et placide elle suit son maitre comme tout chien. Elle avait une vie tranquille à la campagne, prés des moutons. Quand elle arriva dans la famille, un autre chien plus vieux qu'elle était déjà dans la maison. La cohabitation ne posa aucun problème. Belle était aussi de bonne composition. Gardienne de troupeau comme elle, ensemble elles allaient surveiller les moutons, les poules ou courir dans les prés. Quand je venais en visite, toutes deux me faisaient bon accueil, montrant leur joie. Je les caressais doucement, leur parlais simplement, leur disant qu'elles étaient belles et gentilles et que je les aimais bien. Elles semblaient comprendre et satisfaites allaient se coucher dans un coin.

Toutes deux avaient leur gamelle, mais Violette attendait sagement que Belle eut fini la sienne pour gouter au festin. Si l'une d'elle me voyait prendre un bâton, aussitôt elles se levaient en même temps et venaient se frotter à moi. Elles comprenaient que je partais en promenade et que j'allais les emmener. Que de belle balades nous fîmes ensemble, sillonnant les prés, les champs et les bois.
Comme je marchais beaucoup, elles avaient hâte de retrouver ma compagnie et courraient comme des folles. Parfois je les appelais pour qu'elles reviennent plus près de moi. J'ai toujours eu la hantise qu'il leur arrive malheur, une voiture, un mauvais chasseur, un râleur qui n'aime ni gens ni chiens... Obéissantes, elles revenaient et m'écoutaient. Puis elles repartaient en s’ébrouant. Jappant, jouant ensemble, elles démontraient à chacun, qu'un chien plus qu'un humain sait jouir des plaisirs simples de la vie.

Et puis...
Une dame est entrée dans la vie de leur maître qui vivait seul avec sa mère. La Jubine, c'est son nom voulait diriger, régenter à son aise.

Elle commandait la grand mère qui résistait autant qu'elle pouvait. Vint le moment où fatiguée, malade, la mémé cessa le combat. Quand elle partit, le vide fut immense, Belle et Violette se résignèrent comme elle purent. Leur maitre, brisé de chagrin, sans délaisser ses chiens,  se rapprocha un peu plus de la Jubine qui décréta un beau jour  que les chiens étaient une encombre et qu'il fallait s'en séparer, ou bien vivre autrement. Mais elle ne savait pas comment marchaient les affaires ! Il ne se séparerait jamais de ses chiens.
Ils vécurent donc différemment, ne se voyant que de temps en temps. Elle venait parfois, faisait semblant d'inventer de nouvelles recettes comme la tête de veau cuite au four, qui immangeables atterrissaient toutes dans la gamelle des chiens, qui n'en voulaient pas non plus. Quand elle repartait,


Violette, restée seule, retrouvait sa tranquillité et les caresses de son maitre. Lorsque celui ci s'absentait, elle restait enfermée à double tour, attendant patiemment son retour. Il tomba malade et dû partir à l’hôpital. On pris des dispositions pour que Violette puisse rester à la maison.
Le temps fit son oeuvre, un jour, la Jubine débarrassa le plancher, mais pas ses vêtements, ni ses encombrants. Entre temps Belle était partie, dans un coin de jardin, là où se retrouvent tous les chiens.  Un beau jour, la Jubine  fit savoir que finalement elle ne reviendrait pas. Et ce fut bien. Il fallu tout remettre en ordre, il débarrassa donc les vêtements, les encombrants et garda Violette.
Depuis le départ de Belle, Violette était seule avec son maitre et cela lui convenait bien. Quand il ne partait pas trop loin, elle galopait derrière la voiture et le suivait un moment, puis elle revenait tranquillement  sur le chemin, en direction de la maison.
Il se disait qu'il faudrait bien qu'elle accepte de monter en voiture, ce qu'elle refusait jusqu'à présent, car s'il devait s'absenter et qu'il faille la confier à quelqu'un ce serait tout de même plus commode. Mais Violette, retorse, regimbait. Il devenait impossible d'obtenir d'elle le moindre mouvement.
Quand Reine -Marie, une femme formidable, entra dans sa vie, et qu'ils durent prendre des décisions  pour régler au mieux leurs affaires,  il fallu bien que Violette accepta. Elle se résigna à la laisse, d'abord, puis se laissa transporter en voiture. Elle apprit la vie en appartement, elle qui ne rêvait que de vagabonder aux champs.
Reine - Marie avait un chien du nom d'Arthur, une fois de plus, la vie de Violette changeait. La cohabitation se passait bien. Reine - Marie était aux petits soins,  si le roi c'était Arthur, la reine c'était Violette. De temps à autre, tout le monde revenait dans la maison pour quelques jours, et c'était à nouveau le grand air, la liberté retrouvée. Moins agile désormais, Violette  ne vagabondait plus comme autrefois, elle profitait du soleil devant la porte ou près du parc des poules resté vide, depuis le départ de la Jubine.
Une vie sans histoire semblait se profiler enfin. Jusqu'à ce jour où, coup de tonnerre, on fit savoir  à ses maitres que les appartements n'étaient pas faits pour les chiens.
Violette, bon chien, les humain sont loin de valoir autant que toi. On ne les laissera pas faire, ils n'ont pas non plus tous les droits !



Voilà à quoi ressemblent de terribles monstres dangereux pour les populations !


Lettre à Maëly

Toute belle, tu es née un 15 mai. Le même jour que ton  aïeule, que tout le monde appelle toujours mémé Simone, refusant de parler d'elle, seulement au passé.Toi en 2018, elle c'était en 1924.  Le même jour aussi que ta bis-aïeule, que ton papa et ses frère et soeur appelaient mémé qui pique (à cause de ses poils au menton).  D'elle, je ne te parlerai pas beaucoup. C'était je crois une femme de marin, mère de marin. Ton arrière grand père et au moins un de ses frères  étaient matelots. Je ne sais pas ce que fut sa vie et je ne connais pas celle des femmes de la mer. Les livres racontent des histoires de marins emportés par les flots. On y parle encore de la rude vie des pécheurs, embarqués sur les navires pour des mers parfois lointaines et souvent sans lune. Comme ces Terre- neuvas partis de Paimpol, pour l'Islande et qui payent un lourd tribu, quand la mer se déchaine, que la vague est profonde et chavire le bateau. S'il en revient encore pour s'assoir sur le muret le long de la rade à Loguivy de la mer, ce n'est sans doute pas seulement par nostalgie des temps maudits. On peut voir leur regard clair interpeller les flots.
Tu liras dans les livres qui parlent de ces femmes au coeur dur, endolori trop tôt, ce que d'autres racontent beaucoup mieux que moi.

L'Armor et l'Argoat, peut on lire sur les panneaux qui se trouvent sur la route qui mène là bas.
L'Armor,  pays de la mer, l'Argoat, pays de la terre sont le résumé de ce que tes racines te laisseront en substance pour faire de toi l'être unique que tu deviendras.
Car ta grand mère, celle que j'ai connu et qui est partie un matin d'avril, en disant  qu'elle ne reverrait pas ses petits, un sanglot dans la voix, était une femme de la terre. Paysanne- cultivatrice considérée sans profession. Tu apprendras aussi, que même dans ce pays, dit pourtant moderne, civilisé et évolué, il n'y a pas si longtemps que les femmes sont des êtres à part entière ! Si depuis le moyen âge, ont reconnait qu'elles ont une âme,  il a fallu attendre 1945 et la fin de la deuxième guerre mondiale, pour que la Résistance, vainqueure de l'occupant nazi, leur permette d'acquérir le droit de vote.    1967 fut une autre étape importante dans la vie des femmes, puisque c'est seulement le 12 décembre 1967 que le député Gaulliste Lucien Neuwirth, vit sa proposition de loi sur la contraception enfin adoptée, après de longs débats et un travail qui dura plus de deux ans.  Pas moins de 11 propositions de lois avaient pourtant été déposées dans la période allant de 1958 à 1966, sans qu'aucune, jamais, ne soit inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée nationale ! C'est le 19 janvier 1975 que la loi Veil légalisant l'avortement, est adoptée, elle aussi après de vifs échanges et un très long combat.
Aujourd'hui, si un long chemin a été parcouru,  bien des progrès  restent encore à accomplir pour atteindre l'égalité des droits entre les hommes et les femmes, pour qu'enfin on respecte cette partie de l'humanité, sans qui il ne serait permis que l'espèce  se perpétue.

 Ta grand - mère, ta  Néna à toi, te parlera de sa mère,  qui est aussi la mienne, donc, et qui a connu 8 grossesses, dont une n'arriva pas à son terme. Je ne suis pas certaine que toutes furent désirées tant que ça !
Je suis assez sûre du contraire, à vrai dire. Plusieurs fois, elle s'en ouvrit à moi, sans plus de confidences, toutefois.  La rude vie qui fut la sienne ne laissait que peu de place aux effusions et autres considérations personnelles pour se préoccuper de soi.
Levée de bonne heure, parfois avant le jour, elle s'occupait de notre bien être. C'est elle qui affrontait le froid glacial des matins d'hiver et allumait le fourneau pour qu'à notre réveil, nous ayons un peu chaud. En attendant, elle tricotait. Je l'ai toujours vu un ouvrage à, la main, jamais sans rien faire, comme beaucoup de  femmes de la terre, si dures à la peine, trop souvent main d'oeuvre bon marché pour la famille de celui qu'elles épousaient.  Elle gagnait beaucoup plus que le pain qu'elle mangeait.
Quand nous étions levés, les plus grands se préparaient pour l'école tandis qu'elle s'occupait des derniers. Ensuite, elle se rendait à l'étable, où ton arrière grand père l'avait déjà précédée. Elle prenait part à la traite, chacun leurs vaches attitrées, s'il en restait une, c'est elle qui terminait. Faire boire les veaux, passer le lait et faire le fromage, donner aux cochons la pâtée faite avec un peu de mergue (ç'est le petit lait, un mot qui n'est employé qu'en Auvergne, mais rien  qu'en le prononçant on en devine le goût) , s'occuper de la basse cour, des enfants qui n'étaient pas encore en âge d'aller à l'école, aller aux champs, biner, sarcler, piocher, fâner, ramasser l'herbe aux lapins, garder les vaches et les conduire au pré, diriger l'attelage, revenir préparer le diner. Laver, repasser, ravauder et passer le balais. Se rendre au potager, rebiner, resarcler, repiocher, desherber, semer, planter, cultiver. Tout cela pour les jours ordinaires, ceux qui n'amenaient pas un surcroit de travail, comme les gros travaux d'été, les fauchaisons, les moissons, les batteuses et aider aux coupes de bois qu'il fallait aussi rentrer pour l'hiver. Sans parler des salaisons, des fêtes du cochon, du ramassage des pommes de terre et de la cueillette des pommes pour lesquelles tout le monde était mis à contribution.  Il y a -t-il un verbe qui ne soit pas employé pour parler de l'ouvrage qui lui revenait ?
Je ne sais pas par quel miracle elle tenait debout, avait encore du temps pour nous, pour nos devoirs, pour nos histoires et faire de nous les adultes que nous sommes devenus. Je ne sais pas quelle aurait été sa vie si elle n'avait pas pousser celle des deux portes qui déboucha sur une vie de labeur, une vie servante dans sa propre maisonnée. Une vie faite de peu. Peu de considération, elle n'en eut pas. Peu de distraction, elle n'en eut guère. Peu d'argent, elle n'en gagnait pas. Peu de satisfaction, même les meilleurs des enfants ne savent pas toujours se montrer reconnaissants.  Beaucoup d'humilité, de courage et d'abnégation. Beaucoup d'oubli de soi, beaucoup de frustrations, de fièreté malmenée et de larmes avalées. Quand quelqu'un nous faisait des misères ou nous humiliait, je la revois et je l'entends nous dire: "mets tout ça dans ta poche avec ton mouchoir par dessus". Pour sûr, elle savait ce qu'il en coutait d'être de petite condition. J'espère juste, toute belle, que tu auras une vie bien meilleure que la sienne. Et parce qu'avec, Néna, Piri et beaucoup d'autres, nous avons en commun un passé, une passion, rouge comme un mai fleurissant,  pour toute attente, je t'offre cette chanson qui résume à elle seule tout ce qu'on pourrait dire  à une petite demoiselle qui s'éveille à la vie.

signé :
Tata Claude.




Osera bien qui ose

Treize vers à la douzaine (douze plus le titre)
en ...OSE !



Osera bien qui ose

j'aurais pu vous la faire en prose
Mais la consigne précise la chose
c'est en vers et  non en rose
Ne soyons pas morose 
Et puisqu'on nous l'impose
Prenons à faible dose
Pendant une courte pose
Une infusion de baies roses
Nectar de virtuose
Pour rester en osmose
 Sans être grandiose
Et sans métamorphose.


Ma mère

Je suis le vagabond, le marchand de bonheur, je n’ai que des chansons à mettre dans les cœurs, vous me verrez passer chacun à votre tour…. passer au vent léger au bon vent de l’amour, j’ai l’automne et l’hiver, le ciel et la mer, le printemps et l’été pour chanter… 
 Ma mère aimait cette chanson que moi aussi j'aimais chanter.  




Petit bout de mémoire, carré d’une vie dans un tiroir enfoui. Saveur de l’enfance encore épanouie. Oeufs durs salades. Pommes volées de l’oubli. Regard tourné vers une Pinatèle d'où, un jour d'avril,  j'aperçus mes Enclos,  rentrant à la maison aprés un long exil. Ma mère n'était pas avec moi, mais je courrais vers elle, impatiente d'être serrée dans ses bras. C'est ici qu'elle guettait nos retours de l'école où chamaillées par les plus grands, nous ne pouvions nous défendre, ma soeur et moi.

Elle nous accompagnait à l'école, les jours d'hiver afin de nous faciliter le passage entre les congères  qui parfois étaient infranchissables. Nous rebroussions chemin et rentrant à la maison, nous nous chauffions prés de la cheminée en attendant qu'elle ait terminé son ouvrage. 
Nous partagions alors avec elle les souvenirs des temps jadis et nous étions transportés dans les pas d'un aïeux frappant ses sabots sur le sol pour faire tomber la neige. Ou bien jetant sa tourte de pain aux loups qui le suivaient, afin de pouvoir rentrer tranquille à son foyer.
Elle nous parlait des longs hivers, des travaux qu'il faut faire. Elle nous parlait de son père, de la guerre, et nous apprenions à connaitre cet homme qui aimait tant les chiens. Savait chanter et apprécier ses amis.
Elle nous racontait comment il partait le matin sur les chantiers et comment le soir son chien allait l'attendre à la nuit tombée. Le chien savait toujours par quel chemin il allait le trouver. Quand il mourut, ce chien partit tous les jours sur sa tombe. Pendant trois mois. Un soir il ne revint pas. On le trouva étendu aux pieds de son maitre, mort de chagrin à son tour. Youki. Il s'appelait Youki. C'était un jour de mars 1946.




Elle resta seule avec sa mère, démunie et désemparée. Elle avait 22 ans.  Il fallait gagner sa vie. Elle tricota pour les dames de Paris. Une cousine établie dans la capitale, lui procurait sa clientèle qui lui fournissait la laine. Gardant ses 4 vaches en bordures des taillis, de fil en aiguille, elle confectionnait des habits. Les aprés midi, il fallait aller à la vigne ou aux champs, se casser le dos à cultiver la terre de ce sol rocailleux si bas aux miséreux.  


Et puis elle rencontra mon père. 
Ils eurent 7 enfants, dont je suis la première. De sa vie, elle ne connut que peu le bonheur. Tant de souffrances partagées entre  les durs travaux des champs, les soins aux enfants, le bétail et la misère au quotidien.  Je me surprends parfois à penser quelle aurait été sa vie si comme nous elle avait eu un peu de confort, accès à une culture dont elle était par ailleurs friande, aux loisirs dont elle aurait bien su profiter pour se distraire, et seulement au repos de temps en temps. Il m'arrive de me dire qu'elle aussi aurait su créer de belles choses, si seulement elle en avait eu la possibilité matérielle. Ma mère écrivait bien. Elle avait le don du dessin. Elle savait chanter et appréciait la beauté des choses.Si les femmes en son temps avaient eu la chance que nous avons, Elle aussi aurait pu profiter de la vie comme chacun peu l'apprécier aujourd'hui. Ma mère est née le 15 mai 1924. Elle aurait 94 ans.

Un vélo dans le coeur.



Dans Paris à vélo, je dépasse les autos, dans Paris à vélo je dépasse les taxis. Bien sûr cela vous rappelle à tous quelque chose. Jolie mélodie que nous fredonnions jadis en sifflotant sur la colline aux lilas blancs. Quand nous rentrions fourbus de notre escapade, nous nous arrêtions chez la boulangère aux grosses lunettes et dégustions un pain au chocolat. Celui qui restait de la veille ou du matin et nous nous apprêtions à prendre dans le hall de la gare un café blanc. C'était il y a bien longtemps. Avant d'aller travailler, nous nous autorisions cette sortie matinale, le long des quais ou bien du jardin des plantes. Puis nous prenions le métro jusqu'à notre point de chute, l'usine ou le bureau. Nous nous demandions à chaque fois, pourquoi ne pas aller au travail en vélo ? Mais cela devenait une expédition impossible à entreprendre entre les files de conducteurs pressés et souvent irascibles et le temps chronométré pour ne pas se faire avoiner par le chef d'atelier. Alors, nous nous octroyons cette bienfaisante excursion matinale, histoire de nous mettre en forme pour la journée avant de rentrer à la maison prendre une douche rapide et descendre en moins d'un quart d'heure à la station de train de métro ou d'autobus et commencer notre périple dans Paris qui s'éveille encombré de mille et une façons.
J'aimais le vélo. Particulièrement. Cette révélation m’apparut lors de ma prime enfance. Ma mère, paysanne Auvergnate nous racontait souvent comment enfant avec son frère, dès que venait juillet, elle allait chiper le journal sous la porte de son voisin pour quérir les exploits d'Antonin et de Pierre Magne, de Sylvère de Charles ou Romain (tiens : Romain, quel merveilleux prénom!) Maes.
Le frère et la sœur dépliaient le journal, regardaient le résultat de l'étape du jour et reposaient soigneusement le dit journal à sa place sous la porte du Léon Mayade, puisque c'est à lui qu'ils l'empruntaient. Quand j'entendais maman raconter avec quelle passion elle suivait le tour de France, je ne pouvais moi même résister à l'attrait de cet incroyable effort accompli par mes champions préférés : Rick Van Looy, Fédérico Bahamontès, mon aigle de Tolède, Jacques Anquetil et bien sûr Raymond Poulidor ! Parce qu'éternel second j'avais un faible pour les malchanceux et les meurtris de la vie. D'ailleurs la première image de Poulidor que je garde en mémoire, c'est celle d'un jeune paysan conduisant un char de foin avec ses bœufs ou même ses vaches, car la pauvreté aidant, il fallait travailler dur pour arriver à un résultat. Il était des nôtres. Je me reconnaissais complètement dans la souffrance physique qui était la sienne, dans cette vie de laborieux qui était la sienne et la mienne en même temps. Déjà toute gamine, l'injustice me révoltait ce qui me prédestinait inévitablement à une longue carrière au service de la défense des victimes et des laissés pour compte sur le bord de la route pavée d'embûches.
Je suivait assidument les exploits de chacun, sur mon transistor, calé dans la gorbe de foin. Le Charles, notre voisin à mes côtés se ravissait lui aussi d'écouter l'étape du jour en notre compagnie. Nous échangions nos impressions, nous nous livrions aux pronostics parfois hasardeux, mais chacun trouvait une source de plaisir et de dialogue avec l'autre, même d'un avis différents. Nous nous chamaillons aussi parfois, avec nos voisins qui ne se privaient pas de nous contredire mais avec Charles nous étions toujours du même avis. Nous avions une complicité, celle de l'ailleul et de l'enfant, qui était indéfectible et ne se retrouve pas si souvent.
Quand j'eus ma première bicyclette, je parcourrais les chemins et me grisais du vent. Je découvrais de nouveaux horizons, j'allais de plus en plus loin. Cela me ravissait chaque jour. Je garde de ces découvertes, le merveilleux souvenir de mon enfance et de ma jeunesse. Je m'épris d'un coureur cycliste, je me calais dans sa roue et n'en déviais pas. Longtemps, je crus que l'amour était en dehors de ce que j'éprouvais pour lui. Mes copines étaient amoureuse de Johnny, de Cloclo, de Woody Allen (c'est lui sur la photo, je le reconnais bien!) ou de Delon. Moi, c'est l'homme du peloton qui me fascinait et me faisait rêver au prince charmant.

Envies

J'ai envie de  rouge :
de bleu :
 de jaune pourpre :
 de fuchsia :
de jaune :


 de blanc :
 de mauve :
 de doré :
 de vert :
 Belle balade hier sous un ciel bleu sans nuage, le long de la Vienne.




 et de son moulin du Got.


 Besoin de calme de détente et d'air pur ?
C'est ici.
Quand j'étais jeune, bien plus jeune, si on me demandais parfois quelle était ma saison préférée, je répondais invariablement : le mois de juillet. C'était les vacances, l'odeur des foins, les longues journées passées à les rentrer (les foins). Les soirées étoilées où bien fatigués, nous nous calions, enfants,  contre les jambes de mon père, assis devant la porte écoutant les crapauds chanter. Les étoiles qui brillaient nous indiquaient la Grande Ourse, le Chariot, le Berger. Le Berger c'est la première qui s'allume. Celle qui indique au berger qu'il faut rentrer. J'en voyais un conduire son troupeau, son chien jaune et gris sur les talons. Sa longue cape et son bâton me le faisait distinguer des autres hommes rentrant des champs. Dans une chaumière, les femmes chantaient en préparant le chaudron. Mon père nous contait les étoiles, une à une qui s'allumaient. Et dans le ciel, j'y voyais des chaumières pour tous les voyageurs de l'espace. Mon grand père habitait la plus proche, de là haut, il nous  guidait. Cela me rassurait. La plénitude de juillet a toujours pour moi quelque chose de sacré. Mais avec le temps, j'ai appris à apprécier le charme des autres mois de l'année. J'aime toutes les saisons et je trouve à chacune des raisons d'être heureuse et bien dans cette nature magnifique qui recèle tant de secrets.

Le goût du bonheur

C'était un jour classique, un de ceux comme il y en a. Le soleil était à son zénith, dans le jardin planait un parfum de glycine, de genêt d'or et de lilas.



Les chats faisaient des culbutes. Les arbres ondoyaient au  souffle léger du vent. Pas un bruit ne venait troublait ces merveilleux instants.
Nous étions là tous quatre avec belle maman, ne manquait que grand frère pour partager ce moment. Installés sous la tonnelle des arbres du jardin, là où on doit faire notre terrasse, nous devisions ensemble. Nous parlions de voyage, de mer, d'immensité. Nour regardions la belle Firette lustrer son poil luisant. Pivoine rouge s'inclinait vers Pâquerette pour lui faire la conversation.


J'aurais voulu pouvoir arrêter le temps. Figer chaque seconde et en palper la courte durée. Je mesurais combien chaque chose est éphémère et que n'existait pas le présent. L'instant d'avant est au passé celui d'après est au futur. Il ne sert à rien de compter le temps. Profiter  chaque jour de ce qui nous est donné de vivre surtout quand il s'agit de beaux moments.
 Passer du temps avec ceux que l'on aime. Rire, pleurer aussi parfois et se nourrir sans mesure de tous nos sentiments.



Le pain et le fromage.

Je me suis longtemps demandé si l'évocation de certains mots  qui provoquait chez moi un tel désordre était commune à d'autre. Sans doute la relation que l'on a avec eux explique en partie cela. Mais il en est un qui me surprend à chaque fois, c'est le mot "fromage".
Fromage n'évoque pas chez moi un Camenbert, pas même moulé à la louche, issu de la verte Normandie, avec de belles vaches paissant sous des pommiers en fleurs devant une ferme au toit de chaume. Ni même un Saint Nectaire, pas plus qu'une fourme de mes montagnes, fabriqué avec le lait odorant de belles salers, de Ferrandines ou d'une de nos fromagères Brunes des Alpes, Montbéliardes ou blondes Aubracs. Non, Fromage c'est un terroir, c'est un parfum, c'est un goût particulier, de fourrage et d'herbes sèches, de pâture et de prairies. C'est ma mère qui trait à l'étable la Charmante ou la Roussette, la Jacade ou la Mignone. C'est le lait qui caille dans la bassine et qui s’égoutte dans la faisselle toute la nuit. C'est la blanche tomme qu'on sale le lendemain avant de la retourner et de la mettre à sécher à la cave  sur un bon lit de paille durant des mois, avant de la savourer. C'est le quatre heure du faucheur, du moissonneur ou bien du laboureur et c'est le chanteau qui l'accompagne avec un verre de rouge quand un passant quidam, vagabond ou familier s'arrête à la porte et vient s'assoir prés de la cheminée. C'est l'assurance de ne pas connaitre la faim ni l'angoisse du lendemain. C'est la saveur de mon enfance mêlée à celle de la gelée de groseille sur une tartine à mon gouter. C'est le gout des choses simples et du  bonheur partagé.


La reine pivoine

Chaque année, je m'en délecte, je crois que c'est ma préférée. 14 boutons cette année, elle est de plus en plus belle. Comme je partage volontiers, je vous en fais profiter.



La vie de chateau

  Pourquoi cette salle est-elle si déserte ? Pourtant, on dirait bien qu’il y a peu quelqu’un était dans cette salle, il a laissé des saleté...